C'est dur la vie.

Grey crut presque halluciner. Ray qui s'était montrée jusqu'alors totalement neutre lui avait sourit. Et bien, y'avait du mieux. C'était pas encore gagné, mais y'avait du mieux. Il désirait pouvoir faire relativement confiance à Ray pour qu'elle garde l'endroit. Il comptait, quand il y repensait, mettre des choses assez importantes.

Le neko psychopathe s'assit sur le lit et se prit la tête dans les mains. Lui, fatigué? Si peu. Il était vrai, que, en y repensant, il se surmenait un peu. Si en plus maintenant il devait rechercher la réincarnation très certainement amnésique de Kithahara, il était loin de sortir de l'auberge. C'était un beau salaud, ce nouveau dieu, quand il y repensait...

Il leva légèrement son regard vers l'étoile brillante de Ray et lui fit signe de venir s'assoir à côté de lui. C'était un signe encore gentil, mais il le confirma d'un signe de tête rappelant que c'était lui le maître et qu'il souhaitait bien la voir assise sur le lit, juste à sa gauche.

"Au fait, d'où te viens cette espèce d'étoile, dans le bas de ton cou?"

Complètement hors-sujet, mais bon. Si on cherche loin, de bien, avec des lunettes de soleil et le vent dans le dos, il devait surement y avoir un raisonnement logique que cette question avait sa place au milieu de la conversation.

"Et, je crois que tu dois avoir un peu raison. Je dois être fatigué. C'est un peu pour ça que je t'ai... désolé du terme, achetée. J'ai besoin d'entreposer des choses en sécurité, et je ne peux pas rester en permanence ici pour surveiller celui ou celle qui surveille ces choses ou pour surveiller directement ces choses. J'ai besoin de pouvoir te faire un minimum confiance."

Ray s'assit, n'ayant pas trop le choix, et écouta la fin de la tirade de son maître. Elle comprenait plus ou moins. C'était y pas merveilleux ?

Par contre, elle eut besoin d'un temps de réflexion pour répondre à la question. C'était assez délicat.

"Sais pas... Je l'avais quand on m'a trouvée au couvent. Fait six ans maintenant. On a essayé de l'enlever, mais c'est accroché dans l'os en dessous. C'est pas vraiment bijou... Plus une marque."

Elle sourit, un sourire d'excuse : elle ne pouvait pas vraiment expliquer.
On lui avait dit que c'était probablement une marque de clan ou quelque chose du genre. Mais aucune des nonnes de Kithahara n'avait pu lui dire duquel, malgré la grande bibliothèque de l'endroit, ce qui était proprement douteux.

"Je pense je l'ai depuis je suis petite. C'est ce que les religieuses ont dit."

Peut-être en disait-elle en peu plus que ce qu'il ne fallait pour répondre à la question, mais au moins, elle était un peu moins sur la défensive que précédemment. C'était déjà ça de gagné.
Il était fort probable que ça ne durerait pas.

Après un instant, elle se décida à réagir à la suite de la phrase de Grey :

"Je crois sur ce point là, vous pouvez faire confiance... J'aime pas les choses. Je préfère être animaux."

Elle regarda le mur d'un air vide. Sur ce point là.
D'ailleurs, elle se serait bien transformée en panda. Au moins, l'expression de son visage n'aurait pas menacé de la trahir. Quand elle s'en rendit compte, elle sourit à nouveau... Un peu plus faussement.

Grey sourit. Il ne savait plus trop quoi penser, ou faire. Il espérait sincèrement pouvoir lui faire confiance, ça lui simplifierait énormément la tâche... Mais il ne pouvait pas lui donner une confiance aveugle dès maintenant non plus. Il comptait passer une semaine ou deux ici, pour pouvoir être sur de partir sans arrières-pensées pour l'endroit qu'il laisserait sous la surveillance de Ray en s'en allant.

Il poussa un soupir et se laissa tomber légèrement en arrière, pour s'allonger sur le dos. Il poussa un second soupir. Il regarda Ray et se frotta les yeux. Il reprit :

"...Tant mieux alors. J'aimerais pouvoir te faire confiance pour les autres points aussi. Mais on a le temps. Je vais passer quelques jours ici, puis je devrai m'absenter un peu. Je te l'ai dis, tu es presque libre en mon absence... Tu n'as pas à te soucier à ramener de l'argent, ni d'avoir de relations. Tu fais ce que tu veux, du moment que tu remplis les quelques conditions dites tout à l'heure."

Pour Grey, avoir des relations n'était pas quelque chose d'agréable, quand on y réfléchit. Donc il avait dit cela sur un ton tout naturel...

Ray le regarda s'affaisser en arrière d'un air perplexe. Il avait vraiment l'air fatigué, lui. Aucune des règles ne lui semblait impossible à respecter, sauf peut-être celle qui consistait à rester dans le quartier sans s'en éloigner. Remarquez, elle était déjà en train de réfléchir quant à savoir si elle pourrait obéir, plutôt que de programmer une éventuelle évasion ou un éventuel meurtre. Il y avait pas mal de progrès. Espérons que ça dure, et que ses idées psychopathes ne lui reviennent pas. Et pourtant, vu son instinct méfiant et défensif, il y avait de fortes chances pour qu'elle finisse de nouveau par avoir une envie folle de liberté.

"D'accord."

Clair, précis, concis. Enfin, peut-être pas complètement.

"Vous voulez je vous laisse dormir ?"

Non parce qu'il était un peu quatre heures du matin, dans ces eaux là, et Grey avait l'air très près de faire une petite (ou longue) sieste. Elle l'observa d'un air assez patient, parfaitement réveillé, et laissa glisser la couverture de ses épaules. Le coup de froid était passé, elle n'en avait plus besoin.

"Suis désolée de vous avoir réveillé..."

Et elle le pensait. Enfin, pas forcément parce que ça contrariait ses plans, rolala tout de suiiite... Bon, d'accord, elle avait eu envie de l'égorger au sens propre du terme. Mais là, il avait l'air tellement fatigué... Elle se demandait bien quelle charge pesait sur les épaules de son maître.

Grey se redressa légèrement lorsque Ray se mit à lui présenter des excuses. Elle commençait à comprendre que ce qu'il lui offrait, d'apèrs lui, c'était une assez belle vie, sans de trop gros efforts, sinon celui de se laisser soumettre, à fournir. Le psychopathe bailla, tel un vrai lion, mais répondit directement après :

"Non, ce n'est rien. Et non, ne t'en vas pas tout de suite. On va un peu transgresser la directive des huit heures de sommeil, cette nuit. Je ne sais rien de toi, et..."

Il ne désirait pas connaitre chaque détail de la vie passée de son esclave, mais, animé par un sentiment de curiosité enfantine, il aurait aimé en savoir un peu plus sur la métamorphe qu'il avait acheté.

En même temps, il pourrait plus facilement la cerner, et donc, plus facilement trouver comment se faier obéir d'elle sans avoir à recourir à la violence. Il savait que, quand il commençait, en général, il ne s'arrêtait pas avant un bon moment, quand il frappait quelqu'un.

"J'aurais aimé vite fait savoir d'où tu viens, tout ça..."

Il bougea un peu, et se mit dans une position un peu plus confortable : il s'adossa au bois du lit, utilisant son oreiller comme un coussin, et étendit ses jambes derrière le dos de Ray.

Ray, un peu surprise, se tourna néanmoins sur le côté pour faire face à son maître, cherchant avec difficulté dans le fond de sa mémoire de poisson rouge quelques restes des bonnes manières qu'on lui avait enseignées. Brave bête.

Elle réfléchit un moment, visiblement surprise par la question : comment expliquer d'où elle venait sans s'embrouiller ni embrouiller son interlocuteur ? Elle opta pour le simple.

"Ai plus eu de mémoire, pouf, comme ça, un jour, alors ai vécu avec lynx dans la forêt. C'est pour ça je parle mal... Pas souvenirs d'enfant, alors j'ai appris à parler tard."

Le début, c'était à peu près ça. En vachement raccourcis. Elle resta, après cette phrase, la bouche ouverte comme un poisson rouge hors de l'eau, avant de poursuivre difficilement.

"Après, prêtresses de Kithahara m'ont trouvée. Et ont appris à parler, à tout faire comme une humaine. Je savais pas, avant. J'agissais comme chat."

Evidemment, les nonnes savaient parler avant, mais Ray avait du mal. Si si, jvous jure.

"Puis pirates sont venus, et ils ont emmené tout le monde. Alors je suis ici."

Elle n'avait pas, à la réflexion, une si mauvaise élocution que ça, quand elle voulait bien s'appliquer comme elle le faisait en cet instant. Ray avait simplement les mots d'une enfant, et c'était ce même air concentré qu'elle avait, comme si à chaque fois qu'elle prononçait une phrase, c'était la première de sa vie.

"Vous comprenez ? Je n'explique pas très bien..."

Ça, c'était le moins qu'on puisse dire.
Elle baissa les yeux avec un sourire d'excuse. Elle avait vraiment beaucoup de mal.

Grey sourit. Ceci expliquait donc cela. Il comprenait un peu mieux le pourquoi du comment qui faisait que la personnalité de Ray était si lunatique que ça. Il invita gentiment Ray à se mettre à l'aise elle aussi, d'un mouvement de bras. Rester assis ainsi un long moment pouvait faire mal au dos, après tout. Il se poussa lui-même sur la gauche pour laisser un peu de place à son esclave et reprit la discussion :

"Je vois. Connaissant ton passé, tu sais, tu n'expliques pas si mal que ça. Ca se sent que tu fais des efforts, en tous les cas."

Grey s'arrêta de parler à cet instant pour quelques minutes. Il poussa un soupir. Il devait, lui aussi, faire part d'une partie de son passé à la jeune fille, sans quoi elle risquerait, par la suite, d'avoir de mauvaises surprises. Il ne se sentait pas dans le besoin de se justifier, mais, même si elle était sa subordonnée, il trouvait ça plus juste qu'elle sache.

"Moi, je suis un guerrier, comme tu as peut-être put le deviner. Enfin, en même temps, vu la taille de l'épée avec laquelle je me balade, ça doit paraitre logique... Je ne vais pas te donner les détails de mon passé, mais, sache, en gros, que je suis un genre de mercenaire mandaté pour tuer de gros chefs et meneurs. Je suis recherché."

Il sourit et se dit que, en fait, quand on y réfléchissait bien, il n'était qu'un vulgaire pantin, un outil, un esclave lui-même de Kithahara. Celle là, quand il la retrouverait, si tôt qu'elle lui aurait rendu sa puissance, il allait se la faire modèle géant.

"Comme ça tu sais."

Ray s'installa, puisqu'elle en avait le droit, assise en tailleur à côté de Grey. Pas particulièrement approprié quand on porte une robe, mais c'est du RP, alors personne n'a rien vu. Surtout pas Grey, d'ailleurs. Hein non ?

Elle hocha la tête, pas vraiment surprise.

"Vous savez... Pour mes sens d'animal, vous êtes pas au bon âge."

Elle s'arrêta en plein milieu de sa phrase, et se mordilla la lèvre inférieure, espérant à la fois qu'il avait compris et qu'il n'avait pas compris de travers. En effet, à cause de ses nombreuses et fréquentes métamorphoses en animaux divers, elle gardait une certaines faculté à détecter les choses "anormales". Et Grey était beaucoup trop vieux. Enfin, si elle ne se trompait pas.

"Je sais pas, une impression."
Elle essayait de se rattraper :
"Vous êtes pas humain comme moi maintenant, je veux dire. Alors ça semble normal. Les dames du couvent disaient que Kithahara nous envoie parfois des choses ou des gens pas comme nous. Elles disaient ça à cause que j'ai une étoile qui brille, parce que ça brille que par la magie et que c'est bizarre la magie. Comme quand je suis un chat ou un ours à taches."

Elle posa sa main sur l'étoile en question, occultant un peu sa clarté, et sourit comme pour elle-même. Elle aimait bien ne pas être normale. Ça la rendait unique, et l'instinct assez basique qui gérait sa fierté, celui-là même qui hurlait sa colère envers l'esclavage de Grey, avait bien intégré la notion que la différence de la jeune femme était sa force. Finalement, si elle ne faisait généralement pas trop d'efforts pour se faire comprendre, c'était peut-être parce que l'état d'être humain ne l'intéressait pas. Il lui semblait qu'elle avait connu beaucoup mieux. L'état animal, bien sûr.

Grey sourit. Elle avait des petits talents cachés, en plus. Lui vieux? Si peu, à peiiiine neuf mille ans, presque. Ca serait bientôt son anniversaire, d'ailleurs. Il ferma les yeux une seconde, pour mieux les rouvrir, et poser son regard sur l'étoile de Ray. C'était vrai que c'était plutot étrange comme marque, mine de rien...

"Eh bien... Disons que, cette fameuse Kithahara, c'est mon employeur. Je suis mort, il y a des milliers d'années. Et elle m'a ramené pour ma petite mission... Mais ça s'est un peu compliqué, dirons-nous."

Il sourit ensuite, étira son bras devant lui, leva la paume de sa main droite ers le plafond, et, en se concentrant, créa une petite sphère enflammée au creux de sa main. Il sourit et continua :

"La magie n'est pas si étrange qu'on le croit. A vrai dire, elle est même logique... Mais ça aussi, c'est compliqué à expliquer."

Il éteignit la flamme en prononçant quelque chose d'à peine audible, puis prit la main de Ray dans la sienne pour montrer que sa main n'était pas plus chaude que la normale. Il dit alors :

"Si tu veux, comme tu sembles montrer quelques capacités, je pourrai t'apprendre deux trois petites choses... Sur la magie."

Ray fut à la fois contente et triste de voir la boule de feu disparaître. Elle n'aimait pas trop les flammes, ce qui était assez logique si on suit un peu l'histoire, mais elle aimait bien la magie. Elle était encore au stade de s'émerveiller plutôt que de chercher le truc.

Elle sursauta quand son maître lui prit la main, plus par peur de se brûler qu'autre chose.

"Vous m'apprendriez ?"

Visiblement, elle était intéressée. Très, même.

"Je sais que me transformer quand j'ai touché l'animal. Et parfois utiliser ce qu'il sait faire quand suis comme ça. C'est pas beaucoup."

Elle eut un sourire désolé : elle n'avait pas vraiment l'impression d'avoir des "capacités". Pour la démonstration, elle se changea en chat. Le seul problème était que le seul félin qu'elle n'avait jamais croisé était aussi minuscule que Ray ne l'était à échelle humaine. Soit, un petit chaton à longs poils roux roux qui tenait dans la paume de la main. Et qui se retrouva enseveli sous le lourd tissus crasseux de la robe de la jeune femme, qui n'était pas motivé à se transformer aussi. Elle miaula, se débattant, essayant de retrouver son chemin dans le dédale de plis à l'aide de la lueur faiblarde qu'émettait la minuscule étoile incrustée dans son poitrail, seul signe distinctif qui restait de Ray. Non seulement elle n'aurait sans doute pas la force de rester métamorphosée très longtemps, mais d'ici là, elle allait mourir asphyxiée, la pauvre chérie.

Ou pas, en fait. Car à la force de ses petites pattes, elle parvint à se hisser hors du vêtement, la fourrure toute ébouriffée, et à venir s'asseoir hors d'haleine à côté de son maître.

"Mrrraw !"

Oops, elle avait un peu zappé qu'un chat ne parle pas, on dirait...

Grey sourit en l'entendant miauler. Les transformations d'humains en animaux l'avaient toujours impressionné. Lui il était capable de créer des boules de feu et tout, mais il était incapable de changer son apparence en quoi que ça soit. La vie était ainsi... Il répondit au miaulement, sans l'avoir comprit, en disant :

"Intéressant. En fait, quand tu es sous une forme animale, j'arrive à sentir l'énergie magique que tu dégages... Ca doit t'épuiser de rester ainsi. N'abuse peut-être pas trop, on ne sait jamais..."

Il était assez bien placé pour savoir que la magie était capable de faire de gros dégâts sur un corps. Il repensait notamment aux multiples cicatrices qui lui barraient le torse et le corps un peu partout, qu'elles soient grosses ou plus fines. Son corps avait beau être puissant, il n'était plus tout jeune. Il avait déjà vu trop de bataille.

"J'ignore si tes capacités magiques se limitent à la métamorphose animale, mais je peux toujours tenter de t'apprendre des sorts de base, dès demain si tu veux, on sera vite fixés. Qu'en penses-tu?"

En parlant, sans pouvoir s'en empêcher, il était allé pauser sa main sur la toute petite chatonne qu'était devenue son esclave et s'était mis à lui faire diverses caresses, gratouilles derrières les oreilles, et autres du genre... Après tout, c'était aussi un chat, enfin, à moitié, il savait ce qui faisait du bien sous cette forme.

Elle commençait à lui être sympathique. Il avait fait une affaire, en fait. A peine 350 pièces d'or pour une esclave pareille... Il en avait pour son argent.

Ray miaula une seconde fois, pour marquer son accord. Elle avait hâte de savoir si elle était douée pour faire autre chose que se métamorphoser. Peut-être même qu'un jour elle parviendrait à se déguiser en des animaux totalement inventés. Ou à changer les couleurs. Un chat vert, un panda tout blanc... Ça devait être marrant.

Elle se frotta à la main de son maître en ronronnant, comme les chats savent si bien le faire, et se retrouva bien vite les quatre fers en l'air à réclamer des gratouilles. Pas très décent, mais totalement délicieux. Il était étonnant qu'un machin aussi petit puisse ronronner si fort.

Cependant, elle n'allait pas rester sous cette forme bien longtemps. Pas qu'elle n'aie pas envie, loin de là, mais si elle commençait, elle ne s'arrêterait plus avant un long moment : environ dix minutes après sa métamorphose, elle avait du mal à penser comme un être humain, et ne redevenait donc normale qu'après évanouissement ou un choc brutal. Mieux valait éviter les situations embarrassantes, donc.

La jeune fille/chatonne se glissa sous la couverture qu'elle avait fait tomber de ses épaules un peu plus tôt, histoire de ne pas choquer l'assistance, et redevint donc femme. Complètement essoufflée. Quand elle forçait le changement de forme au lieu d'attendre l'épuisement, forcément, ce n'était pas pareil.
Elle enroula la couverture autour d'elle à la vitesse de l'éclair, habituée à ce genre de manipulations délicates, et se retrouva allongée sur le ventre, couverte du dos aux chevilles par l'épais tissus. C'est pas de bol, hein ?

"Voilà, c'est ce que je sais faire. Pas beaucoup. J'ai du mal garder tout mon esprit normal alors je dois vite devenir moi, sinon je me transforme que quand je tombe dans pommes..."

On aime les pommes.

Grey avait caressé la chatonne et s'était presque laissé prendre au jeu des caresses, oubliant que c'était à son esclave qu'appartenaient les ronronnements qui se diffusaient dans la pièce sans la moindre gène. Lorsqu'elle se re-transforma, Grey tilta enfin que ses vieilles fringues étaient sur le lit, et non plus sur les épaules de la concernée.

"Je vois... Eh bien, c'est pas mal du tout. Sans compter que si tu n'as eut aucun précepteur pour développer tes talents, c'est vraiment exceptionnel."

Le psychopathe, comme pour continuer les caresses qu'il avait effectué sur la transformation féline de Ray, alla déposer sa main dans les cheveux de celle-ci et les lui ébouriffa gentiment, en souriant. Et pour une fois, ce n'était pas un vrai psychopathe, c'était plutôt un sourire à mi-chemin entre le contentement, la mélancolie et l'envie de faire un meurtre séance tenante. Pas vraiment sécurisant.

"Enfin bref. On verra sans doute cela demain... Si tu veux que je quitte ma chambre le temps que tu te rhabilles, dis-le. Sauf si ça ne te gènes pas que je reste, alors je détournerai simplement les yeux..."

Ray sourit à la mention de son futur apprentissage. C'était y pas merveilleux ? Grey venait de gagner son sursis quant à la prochaine tentative d'assassinat. Elle n'y pensait d'ailleurs même plus. Elle avait les idées éphémères, tout de même, la demoiselle. Ce devait être du au fait qu'elle avait du mal avec le mode de pensée normal. Quand elle tuait une bébête, c'était surtout pour manger, pas pour une quelconque revendication.

"J'espère ça ira..."

Elle écouta la seconde partie de ce qu'il avait à dire avec attention, mais c'était moins important à ses yeux. La jeune femme haussa les épaules, peu concernée par la question. La pudeur, elle n'avait que les bases : celles qui consistent à faire attention à sa retransformation. C'était à peu près tout. Vachement capillotracté, m'enfin soit. Il fallait dire qu'au couvent, elle avait interdiction de se transformer et devait aller en forêt... Alors forcément, niveau présence humaine, c'était limité.

"Comme vous voulez."

Peu soucieuse de la réponse, elle se leva, fit quelques pas, et tourna le dos à son maître, ayant pris ses vêtements avec elle. L'esclave laissa tomber sa couverture, et remit sa robe sans hâte, ses longs cheveux couvrant de toute manière son dos mieux que n'importe quelle cape.

Grey avait percuté au dernier moment qu'elle allait remettre sa robe là tout de suite juste devant lui, en lui tournant simplement le dos. Légèrement gêné, il tourna la tête vers le mur machinalement. Au bout de quelques secondes, il retourna son regard vers son esclave occupée à se rhabiller et la détailla de haut en bas.

Le corps de son esclave semblait vraiment désirable, en fait. Il se leva, marcha jusqu'à elle et, juste avant qu'elle ne repasse son vêtement, passa ses mains sur les hanches de Ray, et puis dans le bas de son ventre pour l'attirer contre lui et lui faire un câlin gentil. Gentil, si si, je vous jure.

"Dans ce cas, si ça ne te dérange pas, je pense que... Je vais rester."

Il remonta, légèrement avec ses mains, les passa le long des bras de Ray, puis il alla les déposer sur ses épaules, avant de se reculer un peu. Il ne savait pas comment elle allait le prendre, donc il préférait attendre un peu de voir sa réaction... Il n'avait pas envie de devoir la forcer. Si elle lui disait non, ça serait non.

Ray sursauta quand son maître vint l'attirer contre lui. Elle se demanda vaguement ce qu'il faisait là, mais après réflexion, elle n'en avait pas grand chose à secouer. Il faisait ce qu'il voulait, et un câlin, ce n'était pas désagréable.
Malheureusement pour elle, la jeune fille n'imaginait pas ce que Grey avait derrière la tête. C'est beyte.

"D'accord."

Ben oui, ça lui était un peu équilatéral, puisqu'elle ne connaissait pas toutes les données de l'équation. Le problème étant que Grey ne savait probablement pas que Ray ne savait pas ce qu'il avait dans l'idée. Compliqué tout ça.
Toujours est-il que la jeune esclave n'avait comme autre préoccupation que de savoir comment elle allait passer sa robe dans ces conditions. Mais le neko se recula. Plus curieuse de savoir ce qui venait de passer par la tête de Grey que ce qu'elle n'était frileuse ou pudique, elle se retourna, n'ayant passé que les manches de son vêtement, ce qui était en soi très débile. Mais elle était débile, si z'avez pas encore compris. (oui, le verbe est au pluriel, parce que je viens de percuter qu'y en a qui lisent xD (petits voyeurs, va))

"Vous avez drôle d'air comme ça..."

Effectivement, il y avait vraiment une déficience : elle côtoyait un psychopathe depuis plusieurs heures, et elle venait seulement de percuter qu'il avait l'air bizarre. Ou alors, c'était peut-être justement parce que, cette fois-ci, il avait l'air gentil ?

Grey revint à son sourire plus habituel, se rendant compte qu'il devait avoir l'air inquiétant ainsi. Il garda le silence un instant, réfléchissant à comment tourner la situation comme il le voulait. Elle n'avait pas l'air de réellement saisir où il voulait en venir. Peut-être n'avait-elle jamais fait cela? Deux solutions s'exposaient maintenant à Grey. Bourrin ou pas bourrin.

...Enfin, le choix fut vite fait. Qui a dit que Grey était un barbare psychopathe et sanglant? Personne, voyons.

Il s'approcha d'elle, et lui fit baisser les bras pour la faire revenir en arrière dans la remise de sa robe, et avoir ainsi vue sur son corps. Il l'attira à nouveau contre lui pour un second câlin. Comparée à lui qui faisait au bas mot un bon mètre quatre-vingt-neuf (Je dis pas 1m90, sinon y'aurait des français qui auraient pas pigé que nonante=quatre-vingt-dix xD), Ray était plutôt petite du haut de son mètre cinquante.

"Drôle? Moi? Je pense que ça fait bien longtemps qu'on ne m'avait plus qualifié ainsi. Je ne suis pas quelqu'un de gentil, ni d'amusant. Rassurant, non?"

Il la fit se reculer un peu, se détachant d'elle puis la fixa droit dans les yeux. Quelque chose lui disait qu'il faisait une belle connerie en faisant ça, mais, il se pencha vers elle, et déposa n léger baiser sur ses lèvres.

Ray se recula très légèrement après que son maître l'eut embrassée. Heureusement qu'elle n'avait pas non plus trop de mal avec l'hygiène, sinon il aurait été mal barré.
Cependant, elle avait un peu de mal à intégrer le pourquoi du comment. Les câlins, elle avait l'habitude, puisque sous sa forme de chat elle avait attiré toutes les caresses des enfants venus chez les nonnes pour le catéchisme. Certes, ce n'était pas vraiment la même chose, mais presque.
Mais... Les bisous, c'était dans le genre nouveau.

"Qu'est-ce vous faites ?"

Elle regarda le neko avec une certaine perplexité. Les choses nouvelles la mettaient mal à l'aise, elle ne savait pas trop comment réagir. Elle aurait presque eu envie de se retransformer en chat, même si finalement ç'avait été agréable. Elle était en train d'apprendre ce qu'était l'ambiguïté, et pour son esprit d'enfant, c'était plutôt compliqué. Pour un chaton, c'était nettement plus simple : les relations avec les humains ne pouvaient qu'être claires. Heureusement d'ailleurs o_o'

Elle allait se faire un torticolis dans les quinze secondes si elle n'arrêtait pas de scruter le visage de son maître pour essayer d'y déceler la raison de ses agissements bizarres. Elle n'avait pas encore percuté qu'il n'y avait aucune logique aux dits agissements.

Grey plissa légèrement les yeux, avant de les fermer complètement. Il n'aurait pas dû s'aventurer sur une telle pente aussi vite, alors que ça commençait à peine à aller. Mais maintenant qu'il s'était avancé dans cette direction, plus vraiment moyen de reculer. C'était devenu du quitte ou double, et il comptait bien doubler. Au pire, il se ferait obéir d'elle comme il comptait le faire au début, si ça tournait mal.

"Je t'embrassais, dans le but de te séduire.".

Directement, dans la bouche de Grey, ça paraît plutôt cru, dit comme ça et tout, mais bon. Faut pas oublier qui il était. Il préférait être lui-même et dire les choses comme elles étaient plutot que de tourner autour du pot pendant cinquante plombes et se faire chier à lui expliquer où il voulait en venir étape par étape.

Logique non? Et, encore plus logique, il voulait vérifier sa réponse avant qu'elle ne se décide à parler elle-même. Il revint donc tout près d'elle, se rabaissa, puis l'embrassa à nouveau. Soit elle le repoussait, soit elle se laissait faire...

Séduire ? Qu'est-ce que c'était que ça pour une bête ? Vu l'air assez déterminé de Grey, la jeune esclave n'osa même pas poser la question. Elle se laissa embrasser, mais juste après, recula encore. Elle n'avait pas compris grand chose.
Par contre, là, elle venait de percuter... Un mur. Dans le sens littéral du terme. Pas de bol, hein ?

"Comprends pas ce que vous dites..."

Ouf, c'était dit. Surtout qu'avec l'air un peu effrayé qu'elle affichait maintenant, c'était assez logique, qu'elle n'aie pas compris.
Elle n'avait pas peur de Grey en lui-même... Juste de ce qu'il essayait de faire. C'était trop embrouillé pour elle, même si en soi la situation était, pour un observateur extérieur (Nerinaaaa !! n__n) parfaitement simple. Il essayait de se la faire, ça, tout le monde a compris ou alors tout le monde est bouché. Mais il se trouvait que, bouchée parmi les bouchés, Ray était en même temps complètement ignorante de la chose.
Ça lui simplifiait pas la vie, mine de rien, à la petite.
Mais... Si elle était toujours là, sans s'être métamorphosée et enfuie loin, c'était sans doute que, pour raisons inconnues, la situation exerçait une sorte de fascination sur elle. On dit merci aux instincts primaires, mon chéri.

Grey sourit. C'était donc ça... Eh bien, si elle ne comprenait pas...

"Je vais t'expliquer, alors. Laisse-toi faire."

***
Le lendemain matin~

Grey ouvrit les yeux doucement. Il tourna son regard vers sa droite, et découvrit (enfin, re-découvrit) le corps nu de son esclave, étendue à ses côtés. Voila un psychopathe qui avait passé une bonne nuit, eheh. Le neko se leva sans bruit, alla jusqu'à la salle de bain et se lava en vitesse. Après quoi il descendit au salon et s'assit dans un fauteuil, après avoir préparé un peu de café.

Le temps que ce dernier soit prêt, le neko se mit à lire les nouvelles que contenait le journal qu'avait apporté, plus tôt encore dans la matinée, un livreur. Rien de bien spécial ne s'était produit dans les dernières vingt-quatre heures... Depuis la destruction des barbares, il n'y avait plus eut aucun gros-titre.

Quand Ray s'éveilla, elle se sentit toute bizarre. Et pour cause, elle n'avait strictement rien compris à ce que Grey lui avait fait. Sauf peut-être que c'était agréable, et que si c'était ça être esclave, finalement, elle voulait bien le rester.
Au moins, elle ne l'avait pas pris mal, même plutôt bien. C'était déjà ça de gagné. Non parce que bon, ça aurait été nettement moins drôle pour le neko de se retrouver avec un panda dans les bras après dix minutes, non ?

J'imagine trop la scène, en fait. Mwahahaha.

Elle se leva, et passa sa robe toujours aussi désastreusement crasseuse. Elle fit une natte avec ses cheveux, puis refit le lit tant bien que mal, puisqu'il lui semblait que ce n'était pas forcément la disposition normale de la chose. Elle descendit ensuite, ne sachant pas si elle avait le droit d'utiliser la salle de bain avant d'avoir pris connaissance de ses tâches de la journée.
Pour elle, rien n'avait changé, puisqu'elle n'avait rien compris. Pure logique.

Elle vint donc se planter devant Grey d'un air indécis, quoiqu'assez normal.

"Bonjour... Dois faire quelque chose ?"

Comme quoi, si il voulait la traumatiser, il avait encore à faire. Même si apparemment ce n'était pas son but, car si il avait vraiment voulu, elle ne serait pas en si bon état après l'avoir approché de si près. Il se ramollissait, le psychopathe.

Grey leva les yeux vers Ray qui lui avait demandé quoi faire. Il était encore assez tôt, et les magasins n'étaient pas tous ouverts. Pour ses vêtements, elle devrait patienter l'après-midi. Le psychopathe se leva, posa le journal et alla vers la cuisine. Il ouvrit un placard, en sortit une petite bourse, prit quelques pièces d'or. Il remit celle-ci dans une bourse de cuir plus modeste, et l'envoya à travers le couloir à l'esclave en disant :

"Tiens, y'a une épicerie à une rue ou deux d'ici. On est passé devant hier. Va acheter un pain et quelques pâtisseries pour le petit déjeuner. Et avec l'argent qui reste, tu peux t'acheter ce dont tu as envie..."

Après quoi il lança un coup d'oeil à son café qui n'avait toujours pas finit de passer, puis retourna jusqu'au salon pour reprendre la lecture de son journal en disant :

"On ira faire quelque chose pour tes vêtements cette après-midi. On ira chercher des meubles aussi. Et un peu de déco. Ca fait vide, ici."

Ray acquiesca et attrapa l'argent au vol, avant de se diriger vers la porte d'entrée, qu'elle franchit. Pure logique, encore une fois.
Il ne lui vint même pas à l'esprit qu'elle pouvait s'enfuir : il y avait du progrès. Il fallait dire, pour sa décharge, qu'elle était un peu dans les vapes, encore. Bizarre, la nuit, tout de même.

Elle arriva à la boulangerie, fit les courses que Grey lui avait ordonnées, sans grand souci autre que le regard des passants sur sa drôle d'apparence. On aurait dit un fantôme, pâle et inexpressive dans sa robe crasseuse et déchirée. Forcément, c'était rassurant.

Quand elle revint à la maison, elle s'empressa d'aller déposer les commissions dans la cuisine et de préparer un plateau. Tout ça sans dire un mot. Vraiment, c'était un bonheur : pas de babillages inutiles.

Quand elle eut apporté le plateau à son maître, elle sortit ce qu'elle avait acheté : une grande sucette multicolore. Elle adorait ce genre de sucreries, du temps où elle vivait au couvent. Une fois par semaine, les plus jeunes des religieuses en préparaient pour aller les vendre au marché de l'île voisine, un peu plus peuplée.

Ce n'était pas très consistant... Mais qu'est-ce que c'était bon, ce machin !

Grey se mit donc à manger, calmement. Elle commençait à avoir les bons réflexes d'une parfaite esclave. Bien bien. Il mangea à son aise, dégustant son repas du petit matin, puis regarda Ray sucer sa sucette en souriant. (Mais non, roh, ça ne lui rappelait pas ce qui était arrivé cette nuit-là... Ou si peu.) Il se leva, et rapporta son plateau à la cuisine en disant :

"Pour finir, comme on a rien de mieux à faire, je pense qu'on va manger notre repas du midi en ville, et partir dès ce matin. Ton interdiction de quitter le quartier n'est vraie que quand tu es seule. Quand tu es avec moi, tu me suis où que j'aille."

Il savait que ce n'était pas bien de rajouter des règles en cours de route, mais il ne voulait pas se contre-dire par la suite. Et puis, c'était lui le maître après tout... Il prit une bonne moitié de sa réserve totale d'argent dans le placard dans une troisième bourse de cuir, puis la déposa dans une poche intérieure à sa veste. Il n'avait pas équipé son armure, et ne portait pas encore son épée.

Il alla d'ailleurs la chercher, pour se l'attacher dans son dos, par dessus sa veste en cuir brun, et sa chemise de tissu foncé par dessous. Il regarda un instant la laisse qui était restée par terre, puis se dit que, si elle avait pu aller à la boulangerie et revenir sans tenter de s'enfuir, il ne courait aucun risque qu'elle se barre en courant pendant la journée. Il lui fit signe de le suivre à l'extérieur, puis ils prirent la direction d'une rue commerciale, un peu plus proche du palais que du port.

Ils mirent un bon quart d'heure de marche avant d'y arriver. Ils n'avaient pas beaucoup discuté durant ce temps, peut-être parce que Ray était en train de finir sa friandise, mais, quoi qu'il en soit, dès qu'ils arrivèrent au début de la très longue rue, Grey dit :

"Bien. Je connais plus ou moins l'endroit. J'y suis déjà venu plusieurs fois. Suis moi, il y a une boutique de vêtements féminins dans le coin..."

Grey emmena la jeune fille jusque dans une boutique à la devanture garnie de robes en tous genre. Il la fit entrer, puis conclut en disant :

"Choisis ce que tu veux. Et choisis plusieurs ensembles si possible, qu'on n'ait pas à revenir avant un petit temps. L'argent n'est pas un problème, pour l'instant."